Comment diminuer le risque pyrale et sésamie du maïs ?

La Chambre d’Agriculture de la Charente a prospecté courant septembre, en partenariat avec la FREDON Poitou-Charentes, une vingtaine de parcelles de maïs dans le sud (sur 6 ex-cantons) et dans le nord du département (sur 6 ex-cantons). Les observations ont permis de noter les attaques de pyrales et sésamies, sur tiges et épis, ainsi que le nombre de larves total ou ayant atteint le stade leur permettant de passer l’hiver (G1).
Cette prospection à l’automne a pour objectif principal d’évaluer le niveau d’attaque et d’infestation par les pyrales et les sésamies ainsi que de cartographier le risque potentiel de ces ravageurs pour la prochaine campagne de maïs (en 2021).
Pour rappel : les premières captures ont été enregistrées début mai pour les pyrales et les sésamies comme en 2020. Mais les températures fraîches et la météo perturbée du début du mois de mai ont entraîné un décalage. Début juin le retour de conditions climatiques proches de la normale ont été plus favorables au vol des foreurs dont les pics ont été atteint la première semaine de juin pour la sésamie et fin juin pour la pyrale. Les premières attaques de sésamies en pieds de pontes ont été signalées vers la mi-juin. Début juillet les jeunes larves baladeuses de pyrales et sésamies étaient présentes dans de nombreuses parcelles et les conditions climatiques étaient favorables à leur développement et à l’émergence d’une nouvelle génération de papillons.
Sur les résultats obtenus (graphique 1 et 2), une variabilité importante est notée d’une parcelle à l’autre et d’un secteur géographique à l’autre. Une première analyse des données du sud Charente montre que les attaques sont en général modérées avec près de 41% d’attaques sur tiges et 20% sur épis. Les parcelles du secteur nord Charente semblent moins attaquées par les foreurs cette campagne avec une moyenne de 25 % de tiges (de 12 à 42 %) et 15 % d’épis attaqués (de 2 à 24 %). Sur ces épis, la fusariose était peu présente.
En comparaison avec la dernière campagne d’observations, ces attaques sont en diminution sur tous les ex-cantons prospectés (graphique 3 et 4).
Dans le nord du département, les mêmes tendances sont observées dans tous les cantons avec des attaques sur tiges plus faible qu’en 2019 (à noter que 2019 et 2018 étaient des années à forte pression en foreurs). La variabilité des attaques sur tiges s’explique essentiellement par le nombre moyen de larves par plante (pyrale ou sésamie de tous stades). Cette année ce nombre ne dépasse pas 1 individu par plante (graphique 5 et 6).
Pyrale et sésamie réalisent quasiment chaque année deux générations. C’est la deuxième génération qui fait les principaux dégâts économiques et sanitaires. Par contre, une fois l’hiver passé ce sont les populations de première génération qui pourront être à l’origine d’attaques sur les futurs maïs (année N+1).
Cette année encore se sont principalement des larves de première génération (populations de larves hivernantes L4, L5, de grosse taille) qui ont été retrouvées aussi bien pour la sésamie (0,32 larves/pied), que pour la pyrale (0,18 larves/pied) en sud Charente. Dans le nord du département, une inversion des populations a été observée avec plus de larves de pyrale de deuxième génération et plus de larves de sésamie de première génération.
Pour observer une mortalité significatives des foreurs il faudrait un hiver très rigoureux : plusieurs jours consécutifs à - 7° C pour toucher les larves de sésamies dans les tiges ou à - 12° C pour les larves de sésamies à l’abri dans les pivots des maïs. Quant aux pyrales, moins sensibles au froid hivernal, elles peuvent résister jusqu’à des températures de -20° C. Autant dire qu’en Charente les conditions climatiques seules n’auront pas d’influence sur la gestion des populations larvaires.
Toutes ces données doivent inciter à rester vigilant sur la gestion des résidus pour limiter la présence de population pouvant présenter un risque pour les maïs de la campagne suivante. En l’absence de contrôle, les chenilles de pyrale et de sésamie peuvent causer des ravages importants sur la culture. Elles creusent des galeries au sein des tiges, ce qui provoque l’affaiblissement physiologique de la plante avec comme conséquence principale une baisse du poids de mille grains. Dans les cas les plus graves, les tiges cassent et les épis tombent avant la récolte. Au-delà des dégâts directs, les blessures infligées par les insectes favorisent l’entrée de Fusarium et augmentent le risque de dégradation de la qualité sanitaire.
Sur les parcelles impactées par les ravageurs cet été, il est important de broyer et enfouir les résidus pour réduire le stock de larves et limiter ainsi la pression des ravageurs l’an prochain. Le broyage systématique fin et au ras du sol réalisé tôt après la récolte avec un broyeur à axe horizontal permet de détruire les larves ou de les exposer au froid et aux prédateurs. Cette intervention peut permettre d’éliminer 50 à 70% des larves. Attention, le broyeur sous bec des moissonneuses n’a pas une efficacité suffisante en comparaison à un passage spécifique de broyeur post récolte.
L’incorporation des résidus est la seconde étape indispensable qui réduit encore les chances de survie des larves. Le labour, permettant d’enfouir à une plus grande profondeur, sera plus efficace que les autres techniques de travail du sol.
D'autres stratégies de luttes, utilisées en végétation, peuvent aussi permettre de contrôler l'impact de ces ravageurs. Il s'agit de solutions curatives qui consistent à protéger le maïs avec des insecticides ou d’appliquer des trichogrammes en début de vol de papillons de pyrales pour viser les premières pontes. Pour rappel dans les situations à risques pyrale et sésamie, comme en Charente, il reste difficile de viser à la fois les pyrales et les sésamies de façon optimale en un seul et même passage puisque les périodes d’application des ravageurs est décalée. La date de traitement ne coïncidant pas il est souvent constaté un manque d’efficacité sur un des deux ou les deux ravageurs.
Les différents suivis biologiques (chrysalides, vol et pontes), comptages et observations réalisés en cours de campagne, ainsi que les informations relayés par le Bulletin de Santé du Végétal notamment, sont indispensables car ils permettent de définir les périodes les plus optimales d’intervention selon le mode d’action de la protection choisie.